Poèmes ou autobiographie?

Ce matin, je n'sais plus, je n'sais pas. Des semaines et des mois à écrire des poèmes, à laisser parler les rimes et les mots qui chantent et dansent tout en moi. Pour un oui, pour un non, ils frappent à ma porte, et demandent à me voir. Je les laisse venir. Après tout, c'est leur choix. Je les écoute, les reçois, en toute bienveillance, je le crois. Je n'impose rien. Je les guide un peu, mais rien d'intrusif, croyez-moi. Je les aide seulement à  trouver le meilleur réceptacle qui soit, pour eux comme pour moi. Je ne voudrais pas qu'ils repartent déçus, frustrés ou pantois. Ce serait injuste après ces longs chemins parcourus en plein bois, d'où ils m'arrivent, souvent blessés, affolés de surcroît.

Ce matin, pourtant, ma raison s'est remise en action, en devoir de me sermonner, de plein droit : "Mais enfin, tu n'as pas mieux à faire, par ce grand froid, que de laisser entrer les courants d'air de rimes et de vers, le plus  souvent la tête à l'envers? Ce ne serait pas mieux, pour toi, de reprendre les choses à l'endroit, où tu les avais laissées il y a quelques mois? Rappelle-toi, tous ces mots alignés, ces efforts consentis, pour fabriquer un truc qui tienne debout et droit, ta vie, ta voie, ton parcours, ton autobiographie, quoi! Oh, et puis ne nous regarde pas avec ce sourire béat! Tu savais bien, toi, qu'à ouvrir la porte aux rimes et aux vers plein d'émoi, tu risquais de fermer celle des mots bien à plat, qui racontent et expliquent, tout à la fois. Que comptes-tu faire à présent ?"


À entendre ma raison ainsi parler de bon matin à mon petit moi soudain bien à l'étroit, m'est venue l'idée d'ouvrir à nouveau mon cabas : quatre vingt quatorze pages attendaient là, sans bruit ni regret du travail d'autrefois. Juste prêtes au débat, à l'ouvrage, au combat. Seulement voilà ! Prête, moi, je n'y étais pas. Mon coeur ne suivrait pas. Trop d'efforts, trop de moi dans tout ça !  


"Je veux encore voler, m'entendis-je crier! Je veux rêver, planer! Je n'en ai pas terminé de me laisser bercer..."


Du bout des doigts, j'ai alors caressé mes pages d'autrefois. Du coin de l'oeil, j'ai observé les lignes tout droit sorties du cabas.  Mon embarras était bien là, mon désarroi se remarqua. Pourtant, aucune parole ne fut prononcée, chacun se tint coi. Et nul ne fut mis aux abois.

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